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le vol du cygne noir et la révolte des girafes

Dernière mise à jour : 30 mars 2020




Drôle de moment,

Stupéfaction, incrédulité, dénégation, suspicion, angoisse, colère, ennui…

Le vol d’un cygne noir vient de bloquer les rouages complexes de notre monde inter connecté.

La théorie du cygne noirdéveloppée par Nassim Nicholas Taleb est « un événement imprévisible qui a une faible probabilité de se dérouler (appelé « événement rare » en théorie des probabilités) et qui, s’il se réalise, a des conséquences d'une portée considérable et exceptionnelle » (1).

En clair, un évènement que les statistiques ne peuvent prévoir car très peu probable et, de fait, exclut des modèles : tsunami, météorite, pandémie… le grain de sable qui fait dérailler la machine.

Trompés par les statistiques, par la raison, par nos croyances dans nos supposées capacités à appréhender complétement le monde, le piège de la raison se referme sur lui-même. Exit l’improbable.


D’autre part, nous sommes confrontés à un paradoxe : nos systèmes complexes et hyper connectés semblent beaucoup plus performants et solides qu'hier et cependant, ils sont beaucoup plus fragiles.

En effet, nos capacités technologiques et nos organisations complexes nous permettent d'agir fortement sur notre environnement et de nous adapter à bon nombre de situations.

Mais, comme un colosse au pied d'argile, un "cygne noir" nous désorganise très rapidement et nous oblige à tout changer. Nous sommes peu résiliants. Nous pourrions vivre , ce qu'en physique on appelle un "changement de phase". L'ancien équilibre disparait et un nouvel émerge, imprévisible par définition (2). Nous pouvons seulement influer sur l'avenir par nos comportements d'aujourd'hui.


Au Moyen Âge, lorsqu’une pandémie frappait la population, certaines cités étaient décimées et d’autres survivaient. Comme les compétences nécessaires étaient présentes partout, la vie repartait rapidement de ces ilots sans affecter durablement la structure sociale et organisationnelle (2). Les systèmes étaient plus fragiles (médecine peu développée, technologie rudimentaire, etc...) mais aussi plus résiliants.

Nous en sommes bien loin, et nous dépendons pour du paracétamol d’un lieu de production situé à des milliers de kilomètres de chez nous…

C’est aussi l’occasion d’une remise en cause brutale et nécessaire (de mon point de vue) du célèbre T.I.N.A. (there’s no alternative) de M. Thatcher. D’autres modèles sont possibles et même nécessaires. Cette crise nous met face à nos responsabilités. Qu’allons-nous faire ? et surtout, qu’allons-nous faire après ?

Prendre notre responsabilité, mais pas dans le cadre d’un récit de « l’individu autonome et libre » ou chacun est responsable de tout ce qui lui arrive. Une forme de fausse « toute puissance » à la mode et, synchrone avec notre modèle. Pour paraphraser M. Benassayag , si tu vas « pisser en pleine conscience », cela ne suffira pas. Il nous faut envisager notre co-responsabilité, à chacun et à tous.

Pour le Psychosocionome que je suis, je vois se développer autour de moi des réactions au stress (3), phénomènes de fuite, de combat, d’inhibition d’action qui sont le signe d’une angoisse sous-jacente liée aux risques mais aussi, aux informations incertaines et contradictoires. Nous régressons, nous revenons à un état archaïque motivé par la survie.

Cependant, j’observe aussi des phénomènes contraires : soutien, coopération, créativité, empathie…

Nous avons aussi un cœur de girafe (4), un cœur énorme, qui nous permet de nous relier et d’affronter ensemble l’incertitude et les aléas de cette pandémie. Dans son roman, « la peste » A. Camus dit :  «les Hommes ne pouvaient se passer des Hommes» .

Plus nous sommes à même de nous connaitre et de nous reconnaitre, plus nous sommes en capacité de nous relier et, ensemble, de trouver les meilleurs fonctionnements, prendre les meilleures décisions , et donc, plus nous pouvons construire un fonctionnement sécure et agréable: peut-être la révolution des girafes ?

Pour cela nous devons devenir plus mature (et je ne m’exclus pas du " nous " !).

La Psychosocionomie a créé des indicateurs psycho socio économiques. Parmi ceux-ci nous évaluons le développement psycho-affectif (5) afin d’évaluer le niveau de maturité des acteurs et leurs capacités (au moment de l’observation) à prendre en compte l’autre (les autres) et à coopérer.

Force est de constater que d’une façon générale, il est temps de grandir, et, que les individus les plus matures ne sont pas forcément ceux qui ont le plus de pouvoir ou de connaissances.

Pour développer cette maturité il est nécessaire de travailler sur l’altérité. De prendre en compte tous ces autres moi : dans ma famille, mon voisinage, au travail mais aussi d'intégrer les conséquences de mes actes sur d’autres humains du bout du monde dont je dépends et qui dépendent de moi.

Ce temps qui nous est donné est aussi le temps de la réflexion. Réflexion sur nous-mêmes, sur l’essentiel et sur l’avenir.

Nous sommes à la croisée des chemins : allons nous continuer à nous éloigner de la nature, de nous-même et des autres nous-mêmes ? Mais, celle-ci nous rappelle à son bon souvenir. Quand nous déforestons, nous capturons/ consommons/ dérangeons des animaux sauvages, nous créons le contact avec des organismes qui nous sont étrangers. Puis, nous les transportons à une vitesse record tout autour du monde (6). Et, ….nous pleurons sur notre malheur.

« C’est la guerre !», pour ma part, je ne vois aucune guerre, juste un effet systémique et douloureux de nos décisions. « Dans la nature, il n’y a ni punition ni récompense, mais des conséquences » (7 ).

Pour éviter, ou tout au moins amoindrir, ces chocs brutaux, il est temps de changer de logiciel.

Je crois qu’il nous faut renoncer au superflu pour nous centrer sur l’essentiel et, l’essentiel c’est nous.

Sortir des réactions au stress, accepter de ressentir, se remettre à penser et à imaginer.

Ainsi, il devient peut-être possible de favoriser l’empathie à l’isolement, la prise en compte de l’altérité à l’affrontement, la coopération à la compétition, l’indice de bonheur au PIB tout en produisant ce dont nous avons besoin, en envisageant la technologie comme moyen de notre puissance et non comme un ajout de pouvoir aliénant.

H.Laborit , dans une de ses interviews, s’étonnait de la chose suivante après avoir vu Star Wars. Il disait en substance : c’est un monde ou tout un chacun voyage au quatre coin de la galaxie et utilise des moyens technologiques à des années lumières des nôtres ,et cependant, les comportements humains sont les mêmes que ceux des hommes des cavernes. Comportement manichéen, guerres, pulsions… Nous devons grandir à la hauteur des pouvoirs que nous maitrisons.

Nous subissons et nous subirons d’autres Cygnes Noirs. Nous avons peut-être aujourd’hui l’occasion et le temps de préparer demain.

N’hésitez pas à réagir.


j'ai évoqué dans cet article les notions de :

Réaction au Stress.
Indicateurs PSN.
Developpement psycho affectif.

Utilisées en PsychoSocioNomie. Si vous souhaitez en savoir plus , contactez moi
 

(3) Découvertes par H .Laborit les réactions au stress sont une ensemble de réactions métaboliques et de comportements archaïques générés par notre cerveau reptilien afin de maintenir notre intégrité. Réaction organique à l’agression et choc, Masson & Cie, 1952.

(4) Clin d’œil à la Communication Non Violente de M.Rosenberg . la Girafe est l’animal terrestre qui a le cœur le plus volumineux.

(5) Développement psycho affectif : nous avons tous une croissance physique, intellectuelle et cognitive et une croissance psycho affective (notre capacité à nous relier aux autres (capacité d’empathie, prise en compte de l'autre comme sujet et non objet, etc.)). Une forte croissance cognitive n’est pas forcement reliée à une croissance psycho affective. Comme un développement physique harmonieux n’est pas le garant d’un bon développement cognitif (ex : S.Hawking).

(7) Robert Green Ingersoll.


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